CANTO-IOC : étude longitudinale des prédicteurs des impacts positifs et négatifs du cancer du sein un an après la fin des traitements
Le cancer du sein, cancer féminin le plus fréquent, est aussi l’un de ceux qui possède le meilleur pronostic. Cette issue positive ne présage cependant pas des difficultés multiples qui peuvent peser sur les femmes ayant souffert d’un cancer du sein, parfois des années après la fin de leurs traitements. Les autorités de tutelles ainsi que la communauté scientifique recommandent donc d’être particulièrement vigilant, tant sur le plan clinique que sur celui de la recherche, à l’ensemble des impacts qui peuvent retentir sur le quotidien de ces femmes : symptômes physiques, difficultés psychologiques (angoisse de récidive, image de soi altérée…), sociales ou spirituelles. Il s’agit là d’une perception subjective, pouvant varier d’une patiente à une autre.
Des études empiriques se sont certes attachées à décrire la qualité de vie des femmes touchées par un cancer du sein sur le moyen et le long-terme ; ces études se sont néanmoins essentiellement centrées sur la description de symptômes, négligeant ainsi de potentiels impacts positifs liés à l’expérience de la maladie, tels que le fait de faire plus attention à sa santé ou constater une amélioration de son estime de soi.
Afin de proposer des interventions spécifiques aux femmes présentant des difficultés particulièrement intenses ou entravant de façon trop douloureuse leur vie quotidienne, et ce, parfois des années après la fin des traitements, il apparaît donc crucial de cerner au plus près les impacts tant négatifs que positifs perçus par les patientes ayant fait l’expérience d’un cancer du sein, mais aussi leur évolution, et d’identifier ce qui peut déterminer ces impacts.
En effet, une meilleure compréhension de ces déterminants nous permettra d’affiner nos dispositifs de prise en charge. À ce jour, CANTO_IOC est la première étude longitudinale (c’est-à-dire avec un suivi de plusieurs mois) investiguant auprès d’un grand nombre de femmes ayant été suivies pour un cancer du sein leur perception des impacts négatifs, mais aussi positifs liés à la maladie, et ce, avec un questionnaire spécifiquement validé.
En analysant les données issues des questionnaires de 3070 participantes, nous avons ainsi mis en évidence que :
1/ une proportion importante de femmes (78%) présente une détresse psychologique notable un an après la fin des traitements, avec plus particulièrement une anxiété persistante.
2/ conformément à nos hypothèses, un pourcentage significatif de participantes (≈70%) mentionne des impacts négatifs du cancer du sein persistant un an après la fin de leurs traitements, notamment une angoisse de récidive. Par ailleurs, nombre d’entre elles évoque des impacts positifs, par exemple le fait que la maladie les a rendues plus sensibles aux autres (≈80%).
3/ Concernant les facteurs que nous avons mesurés au début de la prise en charge (avant le début des traitements) et qui sont associés avec le ressenti d’un impact de la maladie un an après la fin des traitements, la perception d’impacts positifs plus importants est associée avec moins d’anxiété et plus d’optimisme avant les traitements. La perception d’impacts négatifs plus intenses est quant à elle liée à certaines caractéristiques sociodémographiques (plus particulièrement le fait d’être plus jeune) et psychologiques (symptômes dépressifs plus intenses, optimisme plus bas et pessimisme plus marqué) avant le début des traitements.
En conclusion, un certain nombre de femmes ayant fait l’expérience d’un cancer du sein et des traitements rapportent des difficultés impactant parfois lourdement leur quotidien un an après la fin de leurs traitements. Ces difficultés peuvent cependant coexister avec la perception d’impacts positifs liés à la maladie. L’identification d’un certain nombre de facteurs associés à la perception de ces impacts tant positifs que négatifs et mesurés au début de la prise en charge (avant les traitements) nous permet de repérer précocement les patientes à risque de développer une détresse plus marquée et de leur proposer des interventions adaptées à leur ressenti. La prochaine étape de nos analyses vise à étudier la perception des impacts de la maladie 2 ans après la fin des traitements afin d’affiner notre prise en charge.
« L’étude CANTO-IOC, grâce à votre mobilisation en tant que participantes, nous permet d’être attentifs aux multiples retentissements de la maladie cancéreuse parfois des mois après la fin des traitements. Mieux comprendre votre expérience dès le début de votre prise en charge rend possible l’élaboration d’interventions innovantes et adaptées aux difficultés et besoins de chaque femme ».
Léonor FASSE (Gustave Roussy, Villejuif)